| Mots clés |
Infirmier·ères, Non-reconnaissance, Déqualification, Migrations internationales, Identité professionnelle, Santé, Politiques migratoires, Personnel de santé |
| Resumé |
Cette thèse de sociologie et de démographie traite des processus de non-reconnaissance des qualifications professionnelles et de leurs enjeux sociaux dans l'expérience de la migration internationale. Elle porte plus précisément sur le cas des infirmier·ères diplômé·es hors Union européenne (IDHUE), dont les diplômes obtenus à l'étranger ne sont pas reconnus en France et pour qui l'unique moyen d'exercer leur profession est d'obtenir le diplôme d'État français sanctionnant une période de (re)formation. Si les migrations internationales du personnel de santé ont fait l'objet de nombreux travaux et débats depuis le tournant des années 2000, cette recherche part du constat d'une invisibilité quasi-totale des IDHUE, dans les productions scientifiques, écrites et statistiques, mais aussi dans le débat public ou politique. Ce constat est devenu le fil rouge de cette thèse. En effet, cette recherche brise cette invisibilité à partir d'un corpus de données qualitatif et quantitatif additionnant entretiens semi-directifs, messages postés sur internet, données quantitatives de recensement des IDHUE visibles en France, et données secondaires d'archives professionnelles et législatives. Dans un premier temps, cette thèse analyse les logiques sous-jacentes à la non-reconnaissance des diplômes extra-européens dans une perspective socio-historique, opposant le processus de globalisation de la profession infirmière aux mises en frontières nationales inhérentes aux modalités de gestion du personnel de santé. En France, la non-reconnaissance des diplômes extra-européens apparaît comme le résultat, en creux, des processus de structuration, de reconnaissance, et de protection sociale du groupe professionnel infirmier. Construites en négatif des règles d'autorisation d'exercice des diplômé·es de l'État français et des pays communautaires, les modalités d'accès à la profession infirmière en France pour les autres diplômé·es créent une catégorie, celle d'IDHUE, regroupant une hétérogénéité de profils socio-démographiques. Partant de ce cadre, la démonstration rend compte des projets et expériences - professionnelles et migratoires - des IDHUE en France et du sens qu'ielles leur donnent. À rebours d'une grande partie de la littérature sur les migrations du personnel de santé, cette thèse démontre que, dans ces cas, le diplôme ne peut pas être envisagé comme un "passeport", mais plutôt comme un "bagage". Malgré la non-reconnaissance de celui-ci, la profession demeure, en effet, un élément constitutif de l'identité sociale que les IDHUE portent avec eux et elles. L'argumentation s'attache à présenter les ressorts de la déqualification professionnelle dans une perspective processuelle, dynamique et interactionnelle. À partir de leurs récits de déclassement professionnel (Chapitre 4), de candidatures puis de (re)formation en Institut de formation en soins infirmiers - IFSI (Chapitres 5 et 6), cette thèse s'intéresse aux tensions et dynamiques identitaires liées à la non-reconnaissance professionnelle. |