Resumé |
Les cellules Natural Killer (NK), lymphocytes effecteurs de l'immunité innée, jouent un rôle essentiel dans l'élimination des cellules dont la fonction est altérée, comme les cellules tumorales ou les cellules infectées par un virus. Les cellules NK se distinguent des lymphocytes T par l'absence de récepteur spécifique pour l'antigène. Le mécanisme de cytotoxicité est induit par l'interaction entre des récepteurs d'activation présents à la surface des cellules NK et leurs ligands exprimés par les cellules cibles, sans nécessité de présentation antigénique. Elles présentent un intérêt particulier car, contrairement aux lymphocytes T, elles ne provoquent ni la maladie du greffon contre l'hôte ni le syndrome de relargage des cytokines, qui constituent deux obstacles majeurs en immunothérapie. Toutefois, leur utilisation clinique est limitée par l'absence de méthodes efficaces pour leur expansion ex vivo et leur modification génétique. Sous la direction de la Dr Isabelle André, notre équipe a développé une méthode de production de progéniteurs lymphoïdes CD7+ (appelés ProTcell) à partir de cellules souches et progénitrices hématopoïétiques CD34+ (HSPC). Ce procédé, basé sur un ligand Notch, évite l'utilisation de cellules nourricières ce qui le rend compatible avec une utilisation clinique, et dure sept jours. Actuellement, les ProTcell sont testées dans trois essais cliniques pour évaluer l'absence de toxicité et leur capacité à reconstituer le compartiment lymphocytaire T après allogreffe de HSPCs. Cette approche innovante est compatible avec des modifications génétiques, notamment l'incorporation de récepteurs antigéniques chimériques (CAR) ou d'autres molécules thérapeutiques, ouvrant des perspectives en immuno-oncologie. Grâce aux récentes avancées en omiques, nous avons découvert que l'hétérogénéité des cellules ProTcell est plus complexe qu'initialement anticipé. Nous avons identifié une sous-population de cellules exprimant des marqueurs suggérant l'existence d'un potentiel NK (résultats partie 1). Sur cette base, nous avons exploité le double potentiel de différenciation (T/NK) des cellules ProTcell pour développer une méthode de production de cellules NK (résultats partie 2). Les ProTcell, cultivées pendant 7 à 14 jours avec des cytokines spécifiques (hSCF, hFLT3-L, hIL-2, hIL-7, hIL-15), produisent jusqu'à 10 000 cellules NK par cellule CD34+, atteignant plus de 90 % (CD3-CD56+) de pureté (appelées ProT-NK). Le procédé peut être adapté pour augmenter la production à grande échelle. Les ProT-NK générées ont une identité unique, caractérisée par l'expression de récepteurs d'activation (NCRs, NKG2D, DNAM-1), des facteurs de transcription (ID2, T-bet) et des molécules cytotoxiques (perforine, granzyme B, TNFa). Cependant, elles sont moins matures que les cellules NK dérivées du sang périphérique (PB-NK) expandues, comme l'indique l'absence de certains marqueurs de maturation (CD16, KIRs, EOMES, IFNg). Néanmoins, les ProT-NK ont démontré une cytotoxicité supérieure contre les cellules K562 à plusieurs ratios, comparées aux PB-NK. Dans le modèle murin NSG-Tg(hIL-15), les ProT-NK colonisent la moelle osseuse, le foie et la rate. Ils persistent et maturent dans la moelle osseuse au moins jusqu'à 9 jours après injection. A l'inverse, les cellules PB-NK ne persistent pas dans la moelle osseuse, avec une diminution de leur proportion et nombre après 9 jours. Lors d'expériences anti-tumorales in vivo avec un modèle sous-cutané K562, les ProT-NK ont montré un potentiel anti-tumoral. Notre procédé de culture ex vivo génère avec un rendement et une pureté élevée des ProT-NK, dans lesquelles un CAR peut être introduit. En combinant la culture ProTcell (7 jours) avec la différenciation et l'expansion des ProT-NK (7 à 14 jours), nous proposons une méthode innovante et cliniquement applicable pour produire des cellules NK en grande quantité, ouvrant de nouvelles perspectives pour le traitement des cancers et infections virales. |