Mots clés |
Choc hémorragique, Rhabdomyolyse, Microcirculation, Oxygénation tissulaire, Perfusion rénale, Hémoadsorption, Myoglobine, Insuffisance rénale aiguë, Traumatisme sévère |
Resumé |
Le choc hémorragique et la rhabdomyolyse sont deux causes majeures d'insuffisance rénale aiguë (IRA) dans les suites d'un traumatisme sévère. Bien qu'ils soient souvent associés, leurs effets combinés sur la perfusion, l'oxygénation, la fonction et la morphologie rénales demeurent méconnus. Des études expérimentales ont mis en évidence une synergie délétère entre ces deux agressions sur le rein, aggravant les paramètres de fonction et de perfusion rénale. Parmi les mécanismes possibles, la myoglobine, une métalloprotéine libérée en grande quantité lors de la rhabdomyolyse, semble jouer un rôle central, bien que ses implications précises restent à élucider. Dans un modèle expérimental porcin, nous avons exploré l'impact du choc hémorragique et de la rhabdomyolyse, seuls et combinés, sur l'hémodynamique systémique ainsi que sur les paramètres rénaux. Nos résultats montrent que la rhabdomyolyse exacerbe précocement les perturbations de la perfusion, de l'oxygénation et de la fonction rénale induites par le choc hémorragique. De manière notable, la réanimation par cristalloïdes, efficace dans le choc hémorragique isolé, s'avère insuffisante pour restaurer ces paramètres en cas d'association avec une rhabdomyolyse. Afin de mieux comprendre le rôle de la myoglobine dans cette synergie pathologique, nous avons développé un modèle porcin combinant un choc hémorragique et une injection intraveineuse de myoglobine d'origine équine. Contrairement à nos attentes, l'injection de myoglobine n'a pas induit de dégradations rénales supplémentaires, suggérant que d'autres médiateurs physiopathologiques contribuent à cette synergie délétère. La prise en charge initiale de la rhabdomyolyse repose classiquement sur la correction de l'hypoperfusion rénale par remplissage vasculaire, associée au maintien d'une diurèse satisfaisante et à l'alcalinisation des urines pour favoriser l'élimination de la myoglobine. Cependant, il n'existe pas de traitement ciblant directement cette protéine, bien qu'elle soit identifiée comme un facteur clé dans le développement de l'IRA. Dans une troisième étude, nous avons évalué l'effet d'un dispositif d'adsorption spécifique de la myoglobine (Cytosorb®) dans un modèle porcin de choc hémorragique et de rhabdomyolyse. Nous avons observé que l'application précoce de ce traitement pendant 20 heures aggravait les paramètres hémodynamiques systémiques, amplifiait l'hypoperfusion périphérique et médullaire rénale, et entraînait une augmentation importante de la mortalité. La quasi-totalité des animaux traités ont présenté un état de choc réfractaire à la réanimation, tandis que tous les animaux du groupe contrôle ont survécu. En conclusion, l'association du choc hémorragique et de la rhabdomyolyse exacerbe précocement les perturbations de la perfusion et de la fonction rénales, tout en réduisant l'efficacité de la réanimation par remplissage vasculaire. Les mécanismes physiopathologiques impliqués restent complexes et semblent dépasser le rôle exclusif de la myoglobine. Enfin, un traitement par adsorption de la myoglobine appliqué précocement peut avoir des effets délétères significatifs, appelant à une prudence accrue dans son utilisation clinique. |