Mots clés |
Créateurs autodidactes, Sublimations, Problématiques adolescentes, Rorschach, TAT |
Resumé |
Le processus de création est connu comme le lieu d'un afflux pulsionnel important favorisant une hétérogénéité psychique non-pathologique. Le bouleversement pulsionnel qu'il induit et les modalités de réponse qu'il mobilise en fait un observatoire privilégié du fonctionnement psychique pour mettre en valeur ses ressources, sa souplesse et sa créativité afin de trouver des voies de dégagement pulsionnelles permettant d'échapper aux trajectoires psychopathologiques. En référence au modèle théorique psychanalytique, notre travail de thèse s'inscrit dans la continuité de ces réflexions et celles menées sur le fonctionnement psychique d'artistes notoires et d'auteurs d'Art Brut qui interrogent les liens entre création et sublimation ainsi que les modalités de liaison entre les processus primaire et secondaire. La dimension non-pathologique de cette hétérogénéité retrouvée dans le processus de création, nous invite également à établir un lien avec le processus adolescent. Reconnu comme paradigmatique de la créativité intrapsychique, celui-ci est le lieu d'une résurgence pulsionnelle en lien avec la réactivité de problématiques spécifiques et mobilise une dynamique psychique hétérogène non-pathologique où les variations de fonctionnement psychique témoignent d'une bonne santé mentale. Dans ce travail, nous nous intéressons au fonctionnement psychique des créateurs autodidactes, une population peu étudiée, afin d'explorer les modalités de traitement de l'expression pulsionnelle mobilisées et les problématiques remises en jeu au cours du processus de création. Pour appréhender cette clinique, nous reprenons le concept original de continuum sublimatoire, dont les activités de sublimations relèvent du registre primaire et secondaire, et nous prenons appui sur les travaux approfondis réalisés à propos du processus adolescent. Notre première hypothèse suppose que l'expression pulsionnelle et l'hétérogénéité psychique inhérente au cours du processus de création mobilise un continuum sublimatoire relevant de l'utilisation dynamique des processus primaire et secondaire. Notre seconde hypothèse suppose que le processus de création mobilise une expression pulsionnelle qui vient remettre en jeu les problématiques pulsionnelles, narcissiques et de la séparation/perte, réactivées lors du processus adolescent. L'objectif est d'identifier chez les créateurs autodidactes les modalités de traitement psychiques qui participent à prendre en charge la pulsionnalité et de définir la nature des problématiques psychiques remises en jeu. Notre méthodologie repose sur une cohorte de 12 hommes et femmes créateurs autodidactes, âgés de 27 à 64 ans. Les outils utilisés regroupent l'entretien de recherche semi-structuré et les épreuves projectives, Rorschach et TAT, interprétées selon l'École de Paris et analysées à l'aide d'élaboration de grilles référées à la grille de lecture sensible de l'œuvre et au concept de continuum sublimatoire. Les résultats mettent en évidence l'utilisation d'un continuum sublimatoire relevant de l'utilisation dynamique des processus primaire et secondaire face à l'expression pulsionnelle et à l'hétérogénéité inhérente au processus de création. Notamment, une tolérance d'émergences en processus primaire par le processus secondaire est remarquable. Nous observons la réactivation des problématiques adolescentes, pulsionnelle, narcissique et de la séparation/perte. Notamment, le recours à une armature défensive narcissique vise l'évitement de la problématique œdipienne en raison de la présence d'enjeux douloureux associés au traitement de la séparation/perte. En conclusion, nos résultats participent à apporter un éclairage sur le fonctionnement psychique des créateurs autodidactes et à nous saisir de la richesse et de la créativité dont il fait preuve. Une approche complémentaire du processus de création et des problématiques qu'il mobilise est proposée à la lumière du processus adolescent soulignant leurs similitudes. |