Mots clés |
Carcinome hépatocellulaire, Génomique du cancer, Hétérogénéité tumorale, Classification moléculaire, Immunothérapie, Évolution clonale, Arbre phylogénétique |
Resumé |
Le cancer du foie est le sixième type de cancer le plus courant et la troisième cause de décès liés au cancer dans le monde. Le carcinome hépatocellulaire (CHC), principal type de cancer primitif du foie, représentant 85 à 90 % des cancers du foie, survient principalement chez des patients atteints de maladies chroniques du foie et de cirrhose. En pratique clinique, la majorité des CHC sont diagnostiqués à des stades avancés et seulement 30 % des patients atteints de CHC avancé bénéficient de l'immunothérapie combinée actuelle. Mon programme de recherche de thèse a pour objectifs de : i) déterminer des sous-types moléculaires robustes dans le CHC à partir d'une cohorte large, homogène et bien annotée ; ii) identifier les biomarqueurs clés pouvant prédire la réponse immunitaire pour une utilisation en pratique clinique. Dans mon premier projet, nous avons déterminé neuf sous-types moléculaires robustes du CHC en utilisant des données multi-omiques, incluant le séquençage complet du génome/exome (WGS/WES), le séquençage de l'ARN (RNA-seq), les puces de méthylation et la technologie de reverse-phase protein array sur 529 CHC provenant de 461 patients principalement collectés en France. Trois sous-types fréquents étaient définis par les caractéristiques moléculaires CTNNB1ex3/APC (26 %), TP53 (22 %), AXIN1/IRF2 (11 %). Quatre sous-types rares étaient définis par BAP1 (6 %), TP53+CTNNB1ex3 (6 %), CCNA2/E1 (5 %), HNF1A (1 %). Les deux derniers sous-types, sans altérations moléculaires spécifiques, étaient appelés Indéterminés, UHot (9 %) ou UCold (16 %), selon la présence d'infiltrats immunitaires. Cette classification moléculaire a été validée dans des séries externes, incluant les cohortes TCGA-LIHC, ICGC-JP et CN-Fudan. Globalement, les mutations TP53 et CTNNB1 étaient mutuellement exclusives. Cependant, un nouveau sous-type avec les deux mutations a été classé comme TP53+CTNNB1ex3 présentant des caractéristiques mixtes de CHC CTNNB1ex3 et de CHC muté TP53. Aux niveaux clinicopathologique et génomique, TP53+CTNNB1ex3 montrait un enrichissement en infection par le VHB, une mauvaise différenciation et une instabilité chromosomique élevée, similaire au CHC muté TP53. Au niveau transcriptomique, TP53+CTNNB1ex3 était enrichi dans le sous-groupe transcriptomique G5/6 (voie WNT/bêta-caténine activée) et la classe immunitaire froide, similaire au CHC CTNNB1ex3. En examinant l'évolution clonale des tumeurs TP53+CTNNB1ex3, nous avons constaté que les mutations TP53 survenaient avant les altérations CTNNB1, suggérant un modèle évolutif où la mutation TP53 initie le CHC sous infection par le VHB, suivi par l'acquisition d'une mutation CTNNB1 pendant la progression tumorale, déplaçant l'état transcriptomique vers le sous-groupe G5/6 et conduisant finalement à un mauvais pronostic. Dans mon deuxième projet, nous avons réalisé un WES et un RNA-seq appariés sur des biopsies de CHC collectées avant et après un traitement néoadjuvant par nivolumab chez 40 patients inscrits à un essai clinique. Un contrôle de qualité strict aux niveaux génomique et transcriptomique a été effectué pour s'assurer que les données moléculaires reflétaient fidèlement le paysage tumoral. Les paysages génomiques avant et après l'immunothérapie ont été révélés. En utilisant les données WES appariées des mêmes patients, des arbres phylogénétiques ont été construits pour déchiffrer l'hétérogénéité intra-tumorale et l'évolution pendant l'immunothérapie. En conclusion, ces résultats affinent la classification moléculaire du CHC et seront utilisés pour identifier les marqueurs tissulaires associés à la réponse ou à la résistance à des traitements spécifiques. |