Mots clés |
Médiaféminisme, Féminisme, Féminisme phénoménologique, Empowerment, Empuissancement, Utopies concrètes, Conscientisation, Subjectivation, Acteurisation, Transvaluation, Représentations genrées |
Resumé |
Le médiaféminisme est une mobilisation critique informationnelle qui émerge en France autour des années 2010 avec la création de nouveaux formats médiatiques numériques engagés. Podcasts, newsletters, plateformes vidéos, chroniques, verticales et webzines publicisent ainsi une vision féministe du monde sous un angle inclusif et intersectionnel dans le but d'influer sur la culture patriarcale dominante. Distanciés des médias mainstream autant que des associations militantes mais animés par la volonté de diffuser massivement des outils de pensée émancipateurs, ils interrogent l'articulation entre féminin et féminisme, individuel et collectif, médias alternatifs et industrie culturelle. Cette thèse propose de comprendre comment ils réinvestissent le rôle critique de l'espace public habermassien à partir de l'étude de onze médias, de leurs contenus rédactionnels, d'entretiens réalisés avec des médiaféministes ainsi que de leurs ouvrages littéraires. Ces données empiriques seront analysées en fonction d'un large cadre théorique puis orientées vers une perspective de théorie critique. L'observation de logiques d'empuissancement (empowerment) constituera l'armature de l'argumentation en distinguant trois dynamiques circulaires au sein de ce processus : la conscientisation, la subjectivation et l'acteurisation. Ainsi, la conscientisation de l'emprise désubjectivante de l'industrie culturelle à travers des dispositifs d'aliénation corporelle apparaitra sous les traits de « vies abîmées » (Adorno, 1951) par un système genré hétéronormatif et phallocratique. Issu de cette critique immanente, un féminisme phénoménologique illustrera les principes d'une subjectivation faisant émerger des sujets en quête de sens, de puissance d'agir et de liberté. L'acteurisation des médiaféministes sera alors envisagée sous les deux aspects frommiens de la liberté, positif et négatif (Fromm, 1966), oscillant entre stratégies masochistes et dépassement de la négativité par le biais d'utopies concrètes (Bloch, 1959) et de mécanismes de transvaluation (Nietzsche, 1901) menant potentiellement à d'autres avenirs possibles. |