Évaluation des interférons de type I comme cible thérapeutique potentielle dans le lichen plan
Evaluation of type I interferons as potential therapeutic targets in cutaneous lichen planus
par Chloé GROLLEAU RAOUX sous la direction de Jean-David BOUAZIZ et de Hélène LE BUANEC
Thèse de doctorat en Biothérapies et biotechnologies
ED 561 Hématologie, oncogenèse et biothérapies

Soutenue le mercredi 29 novembre 2023 à Université Paris Cité

Sujets
  • Dermatite de contact
  • Interféron de type I
  • Lichen plan
  • Lupus érythémateux cutané

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Mots clés
Lichen plan cutané, Lupus, Dermite d'interface, Interférons, Interférons type I
Resumé
La dermite d'interface (DI) est une entité qui regroupe plusieurs pathologies dermatologiques. Sa définition est histologique et répond à deux critères majeurs : la mort des kératinocytes basaux et une infiltration de lymphocytes T au niveau de la jonction dermo-épidermique dissociant celle-ci et responsable de la mort kératinocytaire. Les DI comprennent le lichen plan (LP), le lupus, la dermatomyosite et certains psoriasis paradoxaux. Durant ces dernières décennies, le développement de technologies d'analyse transcriptomique de plus en plus avancées ont permis de mettre en lumière le rôle des interférons de type I (IFN-I) dans le lupus. La physiopathologie du LP est quant à elle encore non parfaitement élucidée à ce jour. L'objectif principal de mon travail était de caractériser le rôle des IFN-I dans le LP cutané et d'évaluer l'intérêt de cibler cette voie dans un but thérapeutique à l'échelle pré-clinique. A travers une étude transcriptomique par séquençage en cellule unique (scRNA-seq) sur des échantillons de peaux de patients atteints de LP comparés à des peaux contrôles saines (CS), nous avons pu montrer que l'ensemble des cellules cutanées de LP étaient empreintes d'une signature IFN-I. Celle-ci était d'autant plus marquée dans les sous-populations de kératinocytes et de fibroblastes à proximité de la jonction dermo-épidermique, siège de la réaction de DI. L'ensemble des cellules immunitaires lymphoïdes et myéloïdes présentaient une signature immunologique IFN-I. On observait également une surreprésentation des cellules dendritiques plasmacytoïdes dans le LP, source majeure connue d'IFN-I. Des marquages en immunohistochimie confirmaient la présence des différents sous types d'IFN-I dans la peau de patients atteints de LP, quasi indétectable chez les CS. L'analyse des cellules immunitaires en scRNA-seq retrouvait de nombreux lymphocytes T dans les lésions de LP avec un profil Th1, exprimant fortement l'IFN-gamma et des marqueurs de cytotoxicité. Des expérimentations fonctionnelles complémentaires confirmaient le profil fortement cytotoxique des lymphocytes T isolés à partir de peau de LP par rapport à ceux issus de CS. Afin d'évaluer le rôle fonctionnel des IFN-I, nous avons mis en place un modèle in vitro de LP en mettant en coculture des lymphocytes T et des kératinocytes en condition allo-immune (cellules de donneurs différents sains) et auto-immune (cellules du même donneur atteint de LP). Nous avons montré qu'une stimulation des kératinocytes par l'IFN-beta (un sous type d'IFN-I) les sensibilisaient à la cytotoxicité médiée par les lymphocytes T CD8+ via un mécanisme de reconnaissance spécifique TCR - HLA dans deux modèles in vitro allogénique et autologue. Ces résultats nous faisant fortement suspecter une implication majeure des IFN-I dans la réaction de DI du LP, nous avons évalué l'action d'un inhibiteur du récepteur commun aux IFN-I, l'anifrolumab, dans un modèle ex-vivo de LP par microarray. L'adjonction d'anifrolumab pendant 72h en culture permettait d'éteindre les voies inflammatoires et en particulier celles des interférons. Nous rapportons enfin une patiente présentant une forme frontière entre le lupus et le LP dont le traitement par anifrolumab a permis une guérison complète des lésions cutanées. L'analyse transcriptomique par microarray de la peau avant et après 6 mois de traitement montrait une extinction complète de l'ensemble des voies inflammatoires, incluant celle des interférons mais pas exclusivement. Ce travail a permis une caractérisation précise des différents acteurs impliqués dans la physiopathologie du LP et d'apporter de nouveaux arguments en faveur d'un rôle central des IFN-I dans celle-ci. Des études complémentaires sont nécessaires afin de valider le ciblage de cette voie dans un but thérapeutique chez les malades atteints de LP.