Resumé |
L'excès de consommation en sel est un facteur de risque d'hypertension et de maladies cardiovasculaires. L'OMS recommande, au niveau de la population générale, de ne pas consommer plus de 2 000 mg de sodium par jour. Certains médicaments, notamment les comprimés effervescents, sont responsables d'un apport important de sodium. Objectifs : évaluer le risque cardiovasculaire associé à la consommation de médicaments riches en sodium : (i) en identifiant les études ayant étudié ce risque, (ii) en étudiant l'exposition des patients ambulatoires aux comprimés effervescents et (iii) en recherchant une association entre l'utilisation de paracétamol effervescent et l'hospitalisation pour insuffisance cardiaque (IC). Méthodes et résultats : une revue systématique a permis d'identifier 8 études répondant à nos critères de sélection : 4 évaluaient une exposition courte (¿ à 7 jours), 3 une exposition chronique (¿ 2 ans) et une, l'impact de l'arrêt d'une exposition. Un effet tensionnel était recherché dans les 8 études. Un critère de morbi-mortalité cardiovasculaire était recherché dans 2 études. L'apport sodé médicamenteux variait de 464 mg/j à 4 623 mg/j. Parmi les 3 études ayant détecté un risque cardiovasculaire, deux avaient étudié les médicaments effervescents. Le risque global de biais était important pour 75% des études. Une étude transversale, réalisée chez des patients suivis pour des examens périodiques de santé (EPS) dans un centre parisien, a permis d'évaluer l'utilisation des comprimés effervescents en milieu communautaire. Au total, 1 043 sujets ont participé à l'étude. La prévalence d'une consommation d'effervescents dans les 30 jours précédant l'EPS était de 26,9% (IC95% : 24,2 - 29,6). Cette consommation était fréquente (¿ 2 comprimés par semaine) pour 7,3% des participants (IC95% : 5,7 - 9,8). L'automédication était la principale source d'exposition (93,2% des cas), mais était associée à un faible apport sodé médicamenteux sur les 30 derniers jours (2,2 ± 2,7 g contre 11,3 ± 14,5 g dans le cas de médicaments prescrits, p < 0,001). Le paracétamol, seul ou en association a été retrouvé dans 45,9% des cas. Une étude en case-crossover a été réalisée à partir de l'Échantillon Généraliste des Bénéficiaires, afin de rechercher une association entre l'utilisation du paracétamol effervescent et l'hospitalisation pour IC. Les patients avec un diagnostic principal d'IC sur la période 2014-2016 ont été identifiés. La période à risque était les 30 jours avant l'hospitalisation. Trois périodes contrôles ont été définies (de 60 à 90 jours avant l'hospitalisation, de 120 à 150 jours, et de 180 à 210 jours). L'exposition était définie comme au moins un remboursement de paracétamol effervescent sur une période donnée. Une régression logistique conditionnelle a permis d'estimer les odds ratio (OR et [IC95%]) entre l'exposition et l'appartenance à la période à risque. Les résultats montrent que 9,1% des patients hospitalisés pour IC ont eu un remboursement de paracétamol effervescent en période de risque, contre 8,0% (OR 1,24 [1,02 - 1,52]), 8,1% (OR 1,19 [0,98 - 1,45]) et 8,1% (OR 1,14 [0,94 - 1,38]) au cours des périodes contrôles 1,2 et 3 respectivement. Une tendance temporelle d'exposition comparable a été retrouvée dans un groupe de sujets non hospitalisés pour IC, appariés (1:1) aux sujets IC, suggérant l'absence d'association entre cette exposition et la survenue d'une hospitalisation pour IC. Conclusion : l'utilisation de médicaments riches en sodium est fréquente en milieu communautaire, que ce soit en automédication ou via une prescription médicale. Les comorbidités pour lesquelles un régime contrôlé en sel est recommandé ne sont pas associées à un plus faible recours à ces médicaments. Alors que le risque de développer ou déséquilibrer une hypertension après une exposition prolongée aux produits effervescents semble cliniquement significatif, la preuve d'une association avec des évènements cardiovasculaires reste à établir. |