Resumé |
La leucémie lymphoblastique aiguë à cellules T (LAL-T) est une pathologie hématologique agressive. Les traitements actuels, basés sur des schémas de chimiothérapie intensive, offrent des taux de survie globale ~ 85% chez les enfants et < 50% chez les adultes, ce qui appelle à la recherche de nouvelles options thérapeutiques. Notre équipe a montré que l'activation du récepteur des cellules T (TCR) est fortement anti-leucémique dans des modèles murins de LAL-T. Par ailleurs, les anticorps anti-hCD3 (aCD3) OKT3 ou Teplizumab et Foralumab, cliniquement pertinents, induisent la mort des cellules leucémiques, la régression de la leucémie et une amélioration de la survie des souris leucémiques dans les modèles de PDXs (Patients Derived Xenografts) de LAL-T. Bien que l'utilisation des anticorps aCD3 ouvre une nouvelle option immunothérapeutique pour traiter les LAL-T, en particulier lorsqu'elle est associée à la chimiothérapie, la monothérapie aCD3 conduit à une rechute chez les souris greffées avec les PDXs. Afin de rechercher les mécanismes moléculaires qui président aux propriétés anti-leucémiques des aCD3, nous avons identifié la signature transcriptomique induite par ces anticorps. L'analyse GSEA et KEGG/GO de cette signature a permis d'identifier la voie de signalisation "TNFa via NF-kB" comme la plus dérégulée et qui comprend les gènes codant pour les ligands (TNFa, LTa), les récepteurs (TNFR2), et les adaptateurs (IAP2, TRAFs) de cette voie. L'induction de ces gènes a été confirmée et généralisée à des PDX de LAL-T indépendantes. Fonctionnellement, grâce à l'utilisation d'Etanercept qui neutralise TNFa/LTa, nous avons montré que la voie TNFa favorise la survie des cellules leucémiques. Cependant, l'utilisation de Birinapant qui induit la dégradation de cIAP1/2 permet de rediriger la signalisation TNF d'un programme de survie pour induire un programme de mort des cellules leucémiques et par conséquent prolonger la survie des souris leucémiques. Nous avons montré que cette synergie dépend de l'activité de RIPK1. En effet, nous avons constaté que la phosphorylation de RIPK1 est spécifiquement induite lors d'un traitement combiné aCD3/Birinapant. De plus, l'inhibition de RIPK1 in vitro en utilisant un shRNA, ou in vivo en utilisant un inhibiteur pharmacologique, réverte la coopération entre aCD3 et Birinapant. Ainsi, nos résultats plaident en faveur de l'utilisation du Birinapant ou d'autres SMAC mimétiques pour améliorer les propriétés thérapeutiques des aCD3. Nous avons également étudié le rôle d'autres candidats qui ont été trouvés dérégulés en réponse à l'aCD3, notamment: i) PCD1 codant l'inhibiteur physiologique de la signalisation du TCR, PD-1 et ii) TNFRSF4, TNFRSF9 codant les corécepteurs du TCR, 4-1BB et OX40. Nous avons validé et généralisé à d'autres PDX, l'induction de ces gènes en réponse à OKT3. Fonctionnellement, nous avons démontré que l'inactivation de PD1, soit par shRNA, soit grace à l'utilisation d'un anticorps antagonistique, le Pembrolizumab, renforce les propriétés thérapeutiques des aCD3. L'analyse par RNA-seq du transcriptome des cellules co-traitées par OKT3 et Pembrolizumab montre une augmentation générale de l'ensemble des gènes induits par OKT3, plutôt que la détection d'une nouvelle signature spécifique de cette combinaison. Ces résultats étant en accord avec le rôle inhibiteur PD1 sur le TCR. Nous avons aussi montré que l'anticorps agoniste de 4-1BB, Urelumab, induit également une amélioration des effets anti-leucémiques d'OKT3. L'ensemble de ces résultats suggère que l'utilisation d'outils renforçant l'activation du TCR améliorera les propriétés anti-leucémiques des aCD3. Alors que nos études précédentes ont identifié les anticorps aCD3 comme une nouvelle immunothérapie potentielle pour la LAL-T, ce travail montre que l'analyse de la signature induite par ces anticorps dans la LAL-T a révélé des voies moléculaires qui peuvent être ciblées pour améliorer l'efficacité thérapeutique des aCD3. |