Resumé |
Des études précédentes ont montré une production de CO2 passée significative à partir des lithologies de la séquence du Haut Himalaya (GHS), alors qu'on ne connaît rien de la productivité de CO2 des lithologies du Bas Himalaya (LHS), lesquelles consistent en une séquence sédimentaire épaisse d'âge Paléo- à Méso-Protérozoïque, métamorphosée dans des conditions de faible à moyen grade. Des sites de fortes émissions de CO2 ont été identifiés ces dernières dizaines d'années au Népal central et dans l'Ouest Népal, alors qu'aucune donnée n'est disponible sur les émissions de CO2 actuelles dans l'Est et l'Extrême-Ouest Népal. L'extrapolation depuis des données pétrologiques ponctuelles jusqu'à l'échelle de l'orogène a conduit à estimer des flux de CO2 passés du même ordre de grandeur que les flux de CO2 actuels des sources chaudes. Pour corréler ces données à une échelle régionale, il est nécessaire de comprendre : (i) quelle est la productivité de CO2 des lithologies du LHS et quelle est leur contribution au dégazage de CO2 passé, et (ii) si des sites émettant du CO2 existent dans l'Est et l'Extrême-Ouest Népal. L'évolution P-T du LHS supérieur a été contrainte par une approche de modélisation thermodynamique directe appliquée à six schistes phylliteux alumineux contenant des porphyroblastes de grenats, du staurotide et/ou du disthène. Les chemins P-T obtenus sont caractérisés par un chauffage prograde couplé à une surcharge tectonique (pic P : 9.5-10.5 kbar, 580-590°C), suivi par un chauffage pendant l'exhumation (pic T : 8.2-8.9 kbar, 610-630°C). La comparaison entre les conditions P-T déduites de la croissance des centres de grenats, les assemblages prédits comme stables à ces conditions P-T, et la limite inférieure modélisée de réaction du grenat, suggère que les échantillons étudiés ont connu différents niveaux de dépassement thermique (DeltaT) et/ou barique (DeltaP) apparents pour la nucléation des grenats. La modélisation thermodynamique directe a été appliquée à une sélection de lithologies carbonatées en utilisant le chemin P-T déduit des métapélites. Ceci a permis de comprendre la nature des principales réactions de décarbonatation, de contraindre les conditions P-T auxquelles ces réactions se sont produites, et d'estimer la quantité de carbonates consommés pendant le métamorphisme, avec la quantité correspondante de CO2 produit. Les résultats obtenus montrent que la quantité de carbonates consommés pendant le métamorphisme varie dans la gamme 7-20 vol%, correspondant à 3-10 wt.% de CO2 émis. Il apparaît que la productivité de CO2 des pélites et marnes dolomitiques et magnésiennes est significative, et que ces lithologies pourraient avoir été, et pourraient toujours être, des sources importantes de CO2, contribuant ainsi au dégazage actuel diffus de CO2 de l'Himalaya. L'extrapolation des résultats pétrologiques à l'échelle de l'orogène permet de conclure que les valeurs minimum des flux de CO2 métamorphique passés des segments de l'Est Népal, du Népal central et de l'Ouest Népal sont respectivement de 0,04, 1,57 and 1,68 Mt/an. Pour les émissions actuelles, le flux de CO2 a été mesuré sur le terrain par la méthode de la chambre d'accumulation. En se basant sur les nouvelles données obtenues dans l'Est et l'Extrême-Ouest Népal et sur les données disponibles au Népal central et dans l'Ouest Népal, la quantité de dégazage actuel de CO2 a été estimée en utilisant le krigeage et l'interpolation. Les résultats donnent une quantité totale de CO2 dégazé des systèmes hydrothermaux connus de l'Himalaya du Népal de 11,5±2,8 mol/s, équivalent à (1.6±0.4)×10E+04 t/an. Ces premières estimations de la production de CO2 passée et de l'émission de CO2 actuelle de l'Himalaya du Népal suggèrent que du travail est encore nécessaire pour obtenir une vue d'ensemble de l'émission de CO2 actuelle, et ouvrent des perspectives sur la dualité puits/source de carbone des grands orogènes et le cycle global du carbone. |