Mots clés |
Sélection sexuelle prénatale, Patrilocalité, Discrimination de genre, Emploi vulnérable, Études comparatives |
Resumé |
Cette thèse est le résultat d'un vaste travail analysant la logique économique qui sous-tend la famille patrilinéaire et la préférence pour les fils. Communs à divers pays du monde, ces traits culturels sont à la base de pratiques généralisées de discrimination à l'égard des filles et de millions de femmes manquantes dans le monde, notamment en Inde et en Chine. La principale contribution de ce travail consiste à repenser les raisons économiques qui poussent à vouloir de fils. Dans notre hypothèse de recherche, celles-ci ne se limitent pas au soutien que les fils offrent à leur parents pendant la vieillesse, mais sont dues à un éventail plus large de variations de revenus contre lesquels les fils peuvent potentiellement les protéger : entre autres, la maladie, le chômage, et surtout la volatilité des revenus des emplois indépendants. Dans le but de mettre en évidence des dynamiques crédibles au niveau mondial, ce travail adopte une approche transnationale. Il combine également des analyses quantitatives et qualitatives, ainsi que des concepts et des outils propres à la démographie, l'économie, la sociologie et l'anthropologie. L'étude s'articule autour de deux axes principaux. Le premier cherche à déterminer s'il existe une association entre les comportements de fertilité qui visent à la naissance des fils et la vulnérabilité des revenus, en effectuant d'abord une analyse préliminaire au niveau mondial, et en se concentrant ensuite sur l'ancien bloc communiste. Le choix de cette zone géographique est dû aux événements uniques que celle-ci a subis dans son histoire récente : l' effondrement des régimes communistes et leur transition turbulente vers l'économie de marché. Ces années cruciales ont été marquées par une augmentation radicale de l'incertitude des revenus, visible notamment par une forte croissance des taux de chômage. Une analyse longitudinale au niveau des ménages vérifie si la transition d'un emploi salarié et sûr à un emploi indépendant a eu un impact sur les comportements de fécondité et sur la masculinisation des naissances parmi les familles concernées. La seconde partie de ce travail approfondit cette association et tente de mettre en évidence la dynamique par laquelle elle s'actualise, en construisant une analyse à méthode mixte du cas indien. Nous utilisons, d'abord, des données qualitatives recueillies auprès de ménages à revenu moyen supérieur de Delhi, dans le but de comparer leurs pratiques familiales et économiques. L'analyse met en évidence l'existence d'une série de mécanismes qui renforcent l'adhésion aux coutumes patrilocales chez les indépendants, tel qu'un besoin plus fort de vivre dans des ménages multigénérationnels et un plus faible pouvoir économique chez les femmes. Par la suite, nous utilisons des données d'enquête statistique auprès des ménages indiens pour démêler ces facteurs et isoler le rôle joué par l'un d'entre eux, à savoir la cohabitation multigénérationnelle, dans la reproduction du système familial patrilocal. |