Resumé |
L'exposition aux fortes doses de rayonnements ionisants entraine des effets toxiques sur les tissus / organes irradiés. L'intestin est un organe radiosensible du fait de son autorenouvèlement constant assuré par la prolifération active des cellules souches intestinales (CSI). L'irradiation de la sphère abdominale, lors d'accident nucléaire ou de radiothérapie, avec de fortes doses (>10 Gy) provoque un syndrome gastro-intestinal aigu (SGIA) létal. La mort est associée à la perte massive des CSI, à un défaut de renouvèlement de l'épithélium puis à la rupture de la barrière intestinale entraînant diarrhée, déshydratation et septicémie. A l'heure actuelle, il n'existe pas de traitement efficace pour la prise en charge du SGIA. Les cellules Muse « Multilineage differentiating stress enduring cells » sont des cellules souches pluripotentes adultes exprimant le marqueur embryonnaire SSEA-3 et sont naturellement présentes dans le sang périphérique, la moelle osseuse (MO) et tous les tissus conjonctifs des organes. Elles présentent un grand intérêt en médecine régénérative car elles sont capables de migrer et de s'intégrer à long terme dans les tissus lésés sans être tumorigènes. Dans le tissu lésé, elles participent à la réparation/régénération du tissu grâce à des mécanismes synergiques incluant la sécrétion de facteurs paracrines et la différenciation en cellules spécifiques du tissu hôte. Mon travail de thèse avait deux objectifs principaux : (1) une caractérisation des cellules Muse humaines de différentes origines tissulaires (tissus adultes versus tissus fœtaux) et (2) une étude in vivo évaluant le potentiel thérapeutique de ces cellules dans un modèle murin de SGIA. Les études in vitro ont montré que les cellules Muse isolées de la gelée de Wharton (WJ-Muse) présentaient des propriétés intéressantes pour le SGIA comparées aux cellules Muse isolées de la MO par ce que (1) elles sont récoltées en plus grand nombre, (2) elles sont plus immatures ce qui diminue les risques de rejet après leur injection et (3) elles présentent à leur surface des protéines importantes pour établir la barrière épithéliale intestinale. Par ailleurs, je montre que ces cellules sont capables de limiter la prolifération des lymphocytes T activés par la Concanavaline A et d'induire la polarisation des macrophages de type M2 par l'expression de protéines immunomodulatrices. Dans un modèle murin de SGIA, je montre que l'injection dans les 24 heures après irradiation de 50000 cellules WJ-Muse directement isolées de cultures de cellules souches mésenchymateuses (CSM) ou cryo-préservées, prévient le développement du SGIA et améliore significativement la survie des animaux. Les cellules WJ-Muse localisées dans l'environnement des cryptes intestinales qui renferment les CSI, induisent in vivo une amplification de la sécrétion des cytokines IL-6 et MCP-1. L'IL-6 est associée à une élévation de la prolifération des cellules de Paneth, cellules connues pour participer activement à la réparation du tissu intestinal après irradiation. La sécrétion de MCP-1 induit le recrutement de monocytes qui s'accumulent et se différencient en macrophages de type M2 dans l'intestin grêle lésé limitant l'inflammation et favorisant la régénération. L'injection de WJ-Muse entraîne une réponse régénérative robuste caractérisée par une hyper prolifération des cellules de la crypte, une augmentation de l'expression de protéines de jonction et d'adhésion restaurant l'architecture épithéliale et la fonction de barrière de l'intestin grêle. Il s'agit de la première démonstration de l'effet thérapeutique des cellules WJ-Muse dans un modèle préclinique de pathologie radio-induite. Ces résultats indiquent que l'injection de cellules Muse peut être une stratégie réalisable pour prendre en charge rapidement un SGIA en raison de leur innocuité, de leur haute capacité de régénération avec seulement quelques cellules injectées. |