Mots clés |
Économie, Pulsion, Principe de plaisir, Capitalisme, Subjectivation, Contingence |
Resumé |
Pour notre travail de thèse, nous partons d'une hypothèse selon laquelle le point de vue économique adopté par Freud, lorsqu'il construit sa métapsychologie, implique une manière de représenter la vie psychique dont nous voudrions étudier les effets épistémologiques et pratiques. Il s'agit également d'étendre cette perspective à certains séminaire de Jacques Lacan qui reprend cette matrice discursive que nous identifions sous la double dénomination d' « économie » et d' « économique », en prenant en compte les différents concepts ou idées qui lui sont relatifs (l'argent, le point de vue quantitatif, etc.). Ce travail entend replacer ce motif discursif dans une histoire qui commande l'avènement de son acception dominante entendue aujourd'hui comme économie politique. Il semble que cette définition régionale de l'économie politique - en tant que l'économie constitue dans nos sociétés capitalistes contemporaines le levier principal par lequel s'exerce le pouvoir - convoque en même temps un sens plus originel comme administration de la vie des humains. Cette généalogie nous permet alors de mettre en évidence ce à quoi renvoie plus essentiellement le point de vue économique lorsqu'il s'applique à la théorie psychanalytique, à savoir, une représentation qui tient la pulsion solidaire d'une conception économique de la production. Chez Freud, nous avons repéré le motif économique à partir d'une dimension énergétique de la pulsion qui regarde les enjeux scientifiques et industriels de la fin du XIXe siècle. Chez Lacan, il s'agit davantage d'une critique des présupposés physicalistes de Freud, alors même que ce premier reconduit le point de vue économique en l'inscrivant à l'endroit des années 1960-1970 qui consacrent l'efficacité de l'économie capitaliste en France. Cette exégèse est émaillée de nombreuses références à d'autres auteur.e.s qui permettent des points d'écart, en même temps que sont mobilisés les auteur.e.s d'origine qui, silencieusement, offrent des fondements à certains concepts psychanalytiques à partir de présupposés anthropologiques qu'il s'agit de situer. En somme, il nous a semblé essentiel d'historiciser ce motif discursif économique pour, dans un premier temps, exhumer et déplier les filiations auxquelles il appartient et qui nous semble converger en direction de l'avènement historique du capitalisme. Il s'agit alors de reconsidérer certains concepts psychanalytiques à partir de leur situation d'énonciation et de leur ancrage historique, afin précisément de dénaturaliser certains présupposés qui circulent dans notre champ épistémique. Dans un deuxième temps, après ce travail d'histoire critique, nous avons buté sur les limites que propose l'alternative entre une rationalité économique, où nous avons repéré une pensée antinomique, inadéquate pour penser l'inconscient ; et ce qui a pu être identifiée comme une rationalité mythique (ou onirique), même si elle se présente comme davantage dialectique. Aussi, nous avons été amenés à chercher une autre logique pour la pulsion, attachés à l'horizon éthique qui demande à la psychanalyse d'accueillir les nouvelles modalités pulsionnelles et les modes de subjectivation contemporains qui s'inscrivent à l'endroit de l'usure des imaginaires et des subjectivités produits et offerts par le capitalisme. C'est du côté de la philosophie que nous avons emprunté à Quentin Meillassoux son concept de contingence qui nous semble adéquat pour appréhender les ruptures pulsionnelles que signalent les formations de l'inconscient (symptômes et plaintes qui constituent les raisons pour lesquelles des patient.e.s viennent nous trouver) en tant qu'elles sont des ruptures normatives d'avec les significations imaginaires sociales dominantes. Une logique pulsionnelle contingente, qui rompt avec une représentation anthropologique d'un sujet (d'un humain) producteur, peut offrir un champ d'investigation à la théorie psychanalytique. |