| Resumé |
Les Historiettes de Tallemant des Réaux écrites entre 1657 et 1659, restées volontairement secrètes au XVIIe siècle et publiées pour la première fois en 1834, forment une oeuvre composite de 323 portraits ou petites biographies, florilège et récit de soi. Cette structure fragmentée qui est la caractéristique principale des Historiettes résiste à toute tentative de classement dans un genre. L'oeuvre a été parfois rapprochée des Mémoires, en raison des témoignages qu'elle apporte sur le règne d'Henri IV et de Louis XIII, mais elle est le plus souvent accusée de se réduire à un recueil d'anecdotes divertissantes et souvent grivoises. Nous avons souhaité relevé un défi en nous engageant dans une approche globale des Historiettes pour retrouver le sens caché d'une disparate clairement assumée par son auteur. On ne peut négliger l'importance du récit de soi qui relie souterrainement les Historiettes entre elles et émerge au grand jour lorsque le narrateur déclare en toute fin son identité d'auteur. La fin est en réalité le commencement d'une oeuvre qui s'est développée à rebours du parcours de vie de Tallemant. Cette composition en ellipse nous attire vers le roman de formation dans lequel la personnalité du héros s'enrichit du fruit des expériences mémorables de sa vie. Comparer le recueil d'Historiettes à un roman de formation peut paraître paradoxal et anachronique pour une création du XVIIe siècle, mais c'est un pari que nous avons tenté. Seule la forme libre du roman permettait d'accueillir un récit de soi dans lequel le sujet s'éveille à sa conscience d'écrivain et révèle ses ambitions. Notre objectif a été de mettre en lumière ce parcours caché d'un auteur singulier dont l'écriture se nourrit du style moyen de la conversation cultivée dans l'espace de sociabilité mondaine des salons du XVIIe siècle. |