Mots clés |
Genre grammatical, Langue maternelle, Acquisition, Transfert, Production orale, Oculométrie, Français Langue Seconde |
Resumé |
En langue seconde (LS) certaines propriétés grammaticales semblent être plus difficiles à acquérir que d'autres, telles que le genre. En effet, d'après certains chercheurs comme Franceschina (2005) et Sabourin et al. (2006), la complexité à acquérir ce trait grammatical est due à l'impact de la langue maternelle (LM). Autrement dit, la réussite de cette acquisition dépend de la proximité entre le système du genre en LM et celui de la LS. Ainsi, des systèmes de genre similaires favoriseraient un transfert plus optimal de la catégorie du genre de LM en LS et en permettraient en conséquence une meilleure maîtrise en LS. En revanche, des systèmes de genre différents en LM et en LS pourraient représenter un obstacle pour cette acquisition. Cependant, les recherches sur l'impact de la LM sur l'accord en genre en LS sont loin de présenter un consensus. Par les travaux de cette thèse, nous participons à cette discussion en apportant de nouvelles données expérimentales afin d'enrichir ce débat. La présente recherche porte sur les phénomènes de transfert en acquisition du genre grammatical en français langue seconde (FLS). Les études sur ce sujet sont relativement peu nombreuses (Pieters, 2018 ; Foucart 2008). Nous avons mené une étude expérimentale sur l'acquisition de ce trait grammatical en FLS par des locuteurs de différentes langues maternelles : l'arabe (système de genre similaire à celui du français) et le chinois (dépourvu de genre), deux publics peu étudiés dans la littérature, afin de savoir dans quelle mesure la similarité entre le système de genre en LM et en LS ou l'absence total de ce dernier en LM affecte la capacité des apprenants de FLS à accorder correctement le genre des noms en français. L'objectif principal est d'examiner l'impact de la LM ainsi que les différents facteurs qui peuvent interagir sur l'acquisition du genre grammatical en FLS. Notre hypothèse principale part du principe qu'il existe des phénomènes de transfert de la LM vers la LS qui facilitent l'acquisition pour une partie de nos sujets (ceux dont la LM possède une catégorie du genre comparable à celle du français). De plus, nous supposons que l'intensité et la qualité de l'input en FLS influe sur ce transfert (Cornips et Hulk 2008). Nous examinons également l'hypothèse de Dewaele (2015) qui suggère que l'accord de genre des noms français est plus complexe avec les noms qui commencent par une voyelle qu'avec ceux qui commencent par une consonne, à cause l'élision de la voyelle du déterminant défini qui ne permet pas d'opérer une distinction de genre. Nous avons testé ces hypothèses par la comparaison entre nos différents groupes de LM et un groupe contrôle de natifs français, via deux tâches expérimentales, l'une langagière (production orale), l'autre comportementale (mesures physiques d'oculométrie), en évaluant la compétence de nos apprenants participants à accorder le genre des syntagmes nominaux français correctement à l'oral, et en contrôlant strictement les variables liées à la représentation du genre en LM. Les résultats obtenus ont montré un effet significatif du transfert de la LM, permettant à nos participants arabophones de réaliser une performance nettement supérieure à celle des sinophones, et ce à différents stades d'acquisition, aussi bien en compréhension qu'en production. Nos résultats rejoignent les conclusions de Sabourin et al. (2006) et de Pieters (2018) : plus les systèmes de genre sont similaires en LM et en LS, plus l'accord en genre est maîtrisé en LS. Nos données expérimentales ont également révélé que le niveau de compétence de l'apprenant en FLS limite ce transfert et qu'il est davantage présent durant les premiers stades d'acquisition qu'à un stade avancé. |